Certaines de mes connaissances ont une vision apocalyptique de la dette et des banquiers en général : ils attrapent des tas de boutons à la seule idée d’aller souscrire un emprunt. Le « bon sens paysan » recommande en effet de fuir les dettes comme la peste mais la réalité un peu plus subtile.
Vos liquidités sont votre sécurité
Avoir des dettes et même beaucoup de dettes n’est pas en soi un problème, la vraie question c’est de savoir si vos liquidités sont suffisantes pour prendre le relais pendant une durée suffisante sur ces mensualités en cas de coup dur ou de baisse de vos revenus.
Car votre vraie sécurité ce sont vos liquidités. Si vous avez suffisamment de liquidité pour couvrir 3 ans de remboursement d’emprunt, peu importe que vous soyez endetté à 50% car dans le pire des cas, vous laissez vos liquidités prendre le relais (au moins partiellement) et vous avez au moins 3 ans devant vous pour trouver une solution et réduire votre niveau d’endettement, en allongeant la durée du prêt par exemple.
Quand j’étais jeune, j’ai acheté une voiture et comme je ne voulais pas m’endetter, j’y ai mis toutes les économies que j’avais réalisées. Résultat : je n’avais pas de dette mais mon compte en banque était à sec et je me suis retrouvé chroniquement avec un découvert car je n’avais plus assez de matelas financier. Au début, je n’y faisais pas très attention mais les agios se sont enchaînés et empiraient la situation. Lorsque un de mes chèques a été rejeté pour cause de provision insuffisante, j’ai fini par emprunter de l’argent à ma banque afin d’arrêter les frais.
Comment faire faillite en étant rentable : la crise de liquidité
Ma situation aurait été beaucoup plus saine si j’avais emprunté dès le départ pour acheter ma voiture et si j’avais gardé mon matelas de liquidité. Des tas d’entreprise rentables font faillite pour la même raison : à un moment, leur matelas de liquidité ne couvre pas leurs engagements (par exemple les factures des fournisseurs) et si le banquier ne prend pas le relais en leur accordant un crédit pour leur fond de roulement, elles subissent ce qu’on appelle une « crise de liquidité » : elles font du bénéfice mais elles font faillite quand même. Des tas de PME se sont retrouvés dans cette situation quand les banques ont brutalement arrêté de prêter lors du déclenchement de la crise de 2008.
Si vous lancez un business, si vous construisez une maison, si vous investissez, essayez toujours d’obtenir de votre banquier qu’il vous finance à 100% et n’apportez rien de votre poche. Je ne dis pas que c’est toujours possible mais il faut essayer. C’est d’autant plus vrai quand les taux d’intérêt sont bas. L’idée est toujours la même : garder un maximum de liquidité car, je le répète, c’est votre sécurité. Certes, un emprunt à 100% va réduire votre marge d’exploitation mais si votre business n’est pas viable dans ces conditions, c’est sans doute que ce n’est pas un très bon business et que vous perdez votre temps.
Si vous achetez votre maison et que vous avez des fonds suffisants pour l’acheter, une bonne opération est d’ailleurs de la financer à 100% par l’emprunt, de placer vos liquidités sur une assurance vie et de payer les mensualités en tirant sur cette assurance-vie via des rachats programmés. En théorie, vous devriez gagner un peu d’argent car le taux servi par une bonne assurance vie sera supérieur au taux d’intérêt que vous payez pour votre emprunt. Mais surtout, vous gardez de l’argent disponible en cas de coup dur (contrairement à ce que crois beaucoup de gens, l’argent placé sur une assurance vie n’est pas bloqué et reste disponible).
Votre capacité d’emprunt a de la valeur
Peu de gens comprennent cela mais la capacité d’emprunt (qui correspond à environ 1/3 de vos revenus) est quelque chose de vraiment précieux car c’est un puissant outil de création de richesse si elle est utilisée correctement. Ce qui veut dire que vous devez absolument l’utiliser pour (bien) investir et non pour vous faire plaisir en achetant un BMW X6 ou une croisière en méditerranée.
Dans un précédent article de ce blog, je détaillais une stratégie assez simple d’investissement basée sur l’emprunt qui donnait des chances raisonnables de finir millionnaire à la retraite. C’est un exemple parmi d’autre de « bonne » utilisation de sa capacité d’emprunt.
Un de mes amis, qui s’était spécialisé dans l’immobilier, avait un don pour dénicher des opportunités tellement excellentes qu’il parvenait à gagner de l’argent après avoir remboursé son emprunt (en langage financier, on dit qu’il avait un « cash-flow positif »). Sa 3ème opportunité était l’affaire du siècle mais son banquier ne l’a pas suivi car sa capacité d’endettement était dépassée. Ça n’avait aucune importance puisque ses investissements dégageaient du cash-flow positif mais la banque n’a pas voulu courir le risque et il s’est donc retrouvé coupé dans son élan du fait qu’il avait épuisé sa capacité d’endettement.
En réalité, les banquiers ont beaucoup plus de liberté qu’ils le prétendent pour accepter ou refuser un emprunt. Mais tout est question de confiance et cet ami avait commis l’erreur de lâcher son précédent banquier avec lequel il avait d’excellentes relations car le prêt qu’il lui proposait était 2 dixièmes de pour cent plus cher que celui du concurrent. Il a préféré mégoter au lieu de préserver une relation fructueuse qui lui aurait sans doute permis de poursuivre ses investissements.
La durée d’emprunt ne doit pas vous faire peur non plus. Ce qui est dangereux pour vous, ce sont les mensualités, pas l’argent emprunté. Donc plus l’emprunt est long, plus les mensualités sont basses et plus votre situation sera sécurisée. Evidemment, si votre situation le permet, il vaut mieux privilégier des durées plus courtes car le coût du crédit sera moindre mais une fois encore, privilégiez avant tout votre sécurité en imaginant le pire, quitte à renégocier votre contrat de prêt quand votre situation se sera améliorée. Dans cet optique, pensez à négocier avec votre banquier pour supprimer ou réduire les frais de remboursement anticipé.
Merci d’avoir lu cet article. S’il vous l’avez aimé, n’hésitez pas à le partager ou à le liker.
Be the first to comment on "Pourquoi être endetté n’est pas forcément un problème?"